Il faut que vous lisiez ce livre


Connaissez-vous la terrifiante histoire de la Salpêtrière ? Si vous êtes parisien·ne, vous avez forcément au moins entendu le nom de cet hôpital du 13e arrondissement, dont les bâtiments portent les noms d'hommes de médecine plutôt que celui des femmes qui y ont été instrumentalisées. Difficile de croire aujourd’hui que la Salpêtrière ait été le théâtre de tant de souffrances. 

Avez-vous entendu parler de ces milliers de femmes qui y ont été enfermées, séquestrées, utilisées au fil des siècles ? 


Construit en 1656 et destiné au « renfermement » des mendiants, on y installe dès 1684 une prison pour les femmes « aliénées, prostituées ou condamnées, criminelles ou voleuses ». En un mot, pour les femmes qui dérangeaient et qu’on cachait en attendant de les envoyer repeupler la « nouvelle France » à Québec. Virent ensuite les folles, les séniles et les violentes, les menteuses et les conspirationnistes. Entre l’asile et la prison, y étaient enfermés à la Salpêtrière tout ce dont Paris ne voulait pas s’encombrer : les malades et les femmes. 


À partir du XVIIIe siècle, on finit par n’y admettre que les femmes et même la Révolution Française de suffit pas à améliorer le statut des prisonnières puisqu’après leur libération par les sans-culottes, elles furent violées et exécutées sur le pavé des rues. 


Au XIXe siècle, les folles qui y sont admises le sont cette fois à des soi-disant fins thérapeutiques, où les illustres médecins les étudient et poussent leurs expérimentations jusqu’à la torture (dont je vous épargne les détails). Les aliénées sont alors données en spectacle et constituent le clou d’un divertissement pervers et sadique, jusqu’à pousser le vice, au milieu du siècle, en organisant tous les ans le fameux « bal des folles » à la mi-carême, pour que la bourgeoisie parisienne s’encanaille en s’approchant de ces pauvres âmes torturées, lesquelles attendent impatiemment cet évènement qui leur donne l'illusion que leur vie peut encore être normale. 


Sur ces notes joyeuses, j’ai découvert grâce à ce livre un pan de l’histoire que je connaissais trop peu et j’ai été horrifiée, après recherches, de découvrir que rien n’était exagéré. Le bal des folles constituait, il n’y a pas si longtemps, un divertissement mondain dont on se réjouissait des semaines à l’avance et qui faisait pérorer pendant des mois. On s’amusait de voir des visages figés, des mouvements convulsifs, comme on s’amusait à la même époque des prétendus monstres et autres attractions de cirque.  


Ce livre est nécessaire et devrait être lu par tout le monde. Nous aurions tort de croire que cette époque est révolue et qu’il ne s’agit que de faire une croix sur une histoire honteuse, mais passée. L'histoire de la médecine, si horrible qu'elle soit, justifie aujourd'hui encore son lot de maltraitances médicales. 


Aurore, encore surprise d’être surprise par tant de vices et de cruauté. 


Pour aller plus loin : 

https://journals.openedition.org/criminocorpus/264?lang=en 

Jane Avril, Mes mémoires, éditions l'Escalier